Une aiguille laser pour observer le tout petit

Rubrique : Facultatif
Date de publication : 28 janvier 2021

Les faisceaux de Bessel, ces « aiguilles » de lumières construites à partir des interférences d’un faisceau laser à phase conique (fig. 1), ont de nombreuses applications pour la recherche comme pour l’industrie. Ils sont notamment utilisés pour usiner des matériaux transparents comme le verre ou le saphir et fabriquer des écrans de smartphones ou des verres de montres. Leurs propriétés les rendent aussi particulièrement attrayants pour visualiser les choses les plus petites et observer les phénomènes biologiques invisibles à l’œil nu. Pourquoi les faisceaux de Bessel sont-ils utiles pour la microscopie ?

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Figure 1 : Principe de génération d’un faisceau de Bessel
Les techniques de microscopie laser

Les différentes techniques de microscopie laser, telle que la microscopie à nappe de lumière ou la microscopie à fluorescence sont aujourd’hui des outils indispensables pour les biologistes. La microscopie 2-photons, un type de microscopie à fluorescence, permet par exemple de révéler les structures à l’intérieur même des tissus biologiques et peut même, à l’aide de traceurs fluorescents, suivre l’activité(1) de réseaux de cellules. C’est ainsi une technique particulièrement utile dans le domaine des neurosciences (Pour la petite histoire, la théorie de l’absorption 2-photons fut développée par la géniale Maria Goeppert Mayer, future lauréate du prix Nobel de Physique, durant sa thèse !).

A la base de ces techniques, un faisceau laser. Cependant la focalisation conventionnelle (gaussienne) d’un faisceau laser n’est pas optimale pour certaines applications, voire même limitée. Les faisceaux de Bessel présentent des propriétés particulièrement utiles dans le domaine de la microscopie, y trouvant ainsi de nouvelles applications. Ils sont ainsi utilisés depuis quelques années pour améliorer les techniques de microscopie laser. Quels avantages les faisceaux de Bessel offrent-ils donc pour la microscopie ?

Un faisceau gaussien conventionnel n’offre qu’une faible profondeur de champs. Si cela est utile car cela permet d’imager plan par plan un échantillon, il s’agit d’une technique trop lente lorsqu’il faut imager un volume tel que le réseau de neurones qui constituent notre cerveau. De plus, si le sujet observé est vivant (observation in vivo), des petits mouvements comme la respiration peuvent fausser les mesures(1).

Un faisceau de Bessel possède une focalisation 10 à 100 fois plus longue qu’une focalisation conventionnelle(2) (fig. 2). Ainsi en utilisant un faisceau de Bessel pour illuminer un échantillon et l’imager, les chercheurs arrivent à augmenter considérablement la profondeur de champ de vision, ce qui permet d’imager un volume beaucoup plus rapidement, et ainsi observer en direct des évènements se déroulant dans un volume tout en résistant aux petits mouvements du sujet observé(3).

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Figure 2 : Simulation de la distribution d’énergie dans l’axe de propagation d’un faisceau de Bessel (a) et d’un faisceau gaussien (b)(2)

Il est important de pouvoir imager un échantillon biologique avec une résolution plus petite que la taille des cellules vivantes étudiées. Une résolution de quelques centaines de nanomètres est par exemple nécessaire(1) pour observer des structures cellulaires. Un des avantages des faisceaux de Bessel est qu’ils ne sont pas limités par la limite de diffraction : les dimensions de leur focalisation peuvent être plus petites que la longueur d’onde utilisée, ainsi les faisceaux de Bessel peuvent avoir une largeur de l’ordre de la centaine de nanomètre, offrant ainsi une excellente résolution d’imagerie.

L’observation de tissus biologiques avec une technique de microscopie laser peut, pour des échantillons sensibles, occasionner des perturbations ou des dommages par absorption de l’énergie lumineuse par les tissus étudiés. Les faisceaux de Bessel, du fait de leur extrême longueur, ont une énergie lumineuse plus «étalée» qu’un faisceau gaussien. Ils permettent d’imager un échantillon en l’exposant à une intensité lumineuse moins importante, réduisant ainsi les dommages potentiels(1).

Un faisceau de Bessel est construit le long de l’axe de propagation par l’interférence de photons arrivant de côté (fig.1) Cela lui confère la propriété d’être « régénérant », c’est-à-dire que le faisceau se reconstruit de lui-même s’il rencontre un obstacle le long de sa propagation(4). Cette propriété est notamment mise en pratique pour la microscopie à nappe de lumière : cette technique utilise un faisceau laser pour illuminer un échantillon de côté, et si cet échantillon est trop épais, le faisceau laser a tendance à se disperser, ce qui limite la qualité de l’image. Avec la propriété régénérante des faisceaux de Bessel, la qualité de l’image est augmentée même pour des échantillons épais. Ainsi, des chercheurs de l’université de Freiburg (Allemagne) ont appliqué des faisceaux de Bessel à l’imagerie pour pouvoir visualiser 50% plus profondément la peau humaine(4).

CANUNDA-AXICON

Cailabs développe depuis 2017 des axicons entièrement réflectifs pour des applications haute précision. La précision de fabrication de ces axicons permet d’obtenir des faisceaux de Bessel de qualité exceptionnelle, en évitant les aberrations chromatiques et oscillations d’énergie typiques des axicons réfractifs conventionnels. Cette qualité fait de CANUNDA-AXICON un outil parfait pour les applications d’imagerie et de microscopie.

Sources :

(1) Extended two-photon microscopy in live samples with Bessel beams: Steadier focus, faster volume scans, and simpler stereoscopic imaging (2014), Gabrielle Thériault et al. 

(2) Application of Bessel beams for ultrafast laser volume structuring of non-transparent media (2010), Alexeev et al.

(3) Rapid volumetric imaging with Bessel-Beam three-photon microscopy (2018), Bingying Chen et al. 

(4) Bessel beam allows microscope to look deep into tissue (2010), John Wallace 


Sami Carre 1

Par Sami Laroui

Ingénieur diplômé en sciences des matériaux et titulaire d’un Master en innovation et entreprenariat, Sami Laroui a rejoint Cailabs en 2018. Il contribue, en tant qu’ingénieur avant-vente, au développement et à la commercialisation de solutions optiques innovantes optimisant la qualité et le rendement des procédés d’usinage laser.